Monter un festival, c’est tout un art. Au commencement, il y a une idée, un esprit sur lequel construire une dynamique. A l’origine du Motocultor festival, il y a justement Motocultor, un groupe de reprises disco et de génériques de dessins animés en version Metal.

L’âme a été modernisée, reliftée année après année pour devenir atypique et éclectique. Le choix du lieu est aussi essentiel. Il doit devenir ce « monde à part » qui marquera les esprits. Quand on se sent bien quelque part, on n’y revient. Côté budget, différentes sources possibles : direction régionale des affaires culturelles, région, ville, institutions, entreprises…et soutien indissociable à la quête de financements, celles et ceux sans qui, souvent, rien ne serait possible : les bénévoles ! Côté programmation, mieux vaut des artistes bien choisis que des artistes à tout prix. Il s’agit de soigner sa ligne artistique pour être crédible. On ne fait pas venir Christine And The Queens au Motocultor ! Arrive alors le temps de la communication. Objectif : rendre le festival le plus visible possible. Pas une mince affaire me direz-vous. Cela commence par une stratégie et une charte en béton. Puis, c’est l’artillerie lourde sur les réseaux sociaux, les campagnes d’affichage, édition de flyers, les warm up…le Jour J approche et tous les clignotants sont au vert. Sold out pour la première fois de son histoire, le Motocultor peut commencer (30.000 entrées). Une année record donc pour le festival breton, qui grâce à une affiche pointue et ouverte affole les compteurs. Déjà une belle consécration. Envoyez la musique !

Les uns et les autres se mélangent et se confondent dès le départ. Ces festivaliers sont faits du même métal, celui capable d’absorber au-delà des 100db prescrits. Quel que soit l’endroit où l’on se trouve, le silence total n’existe pas. Et c’est bien cela que l’on vient chercher au Motocultor festival. Un évènement à taille humaine, qui avait failli être annulé en 2017, et qui renait de ses cendres presque fumantes (Malgré une dette de 280.000€ qui plane encore au-dessus de leur tête). Autant le dire de suite, cette onzième édition est une réussite sur toute la ligne, tant sur le plan de l’organisation, de la programmation, de la fréquentation, de l’ambiance et de la météo bien clémente ce week-end là.

Sur un plan musical, les têtes d’affiche n’ont que rarement déçu. Que ce soit Ministry, Devildriver, Alestorm, Ultra Vomit pour le vendredi, Behemoth, Cannibal Corpse, The Black Dahlia Murder, Nostromo, Tagada Jones pour le samedi (Seul Abbath alias Olve Eikemo et ex Immortal nous surprendra par son détachement et son set en roue libre), Sepultura, Les Tambours du Bronx, Phil Campbell, Nashville Pussy, Comeback Kid pour le dimanche. Tous ont été à la hauteur de leur prestation et se sont donnés à 100%. Les « outsiders » que sont Lumberjacks, les Sticky Boys, The Young Gods, Hangman’s Chair, Suicidal Angels, Punish Yourself, Tranzat, Toxic Holocaust, Municipal Waste…ont ravi le nombreux public et remportés tous les suffrages. Parmi les groupes que je n’avais jamais eu l’occasion de voir, je citerais pour leur implication et leur volonté de bien faire : Pelican, Turisas, Jinjer et Warbringer. La surprise viendra d’où on ne l’attend pas. Le bluesman new-yorkais Popa Chubby (Son nom de scène vient de l’argot « Po a chubby » qui signifie « Avoir une érection ») en adaptant sa set list (Avec des reprises de Black Sabbath, The Ramones, Ray Charles…) confirmera tout le bien que l’on pense de lui et donnera entièrement raison à l’équipe du Motocultor quant au choix de sa venue.

Mon coup de cœur personnel sera attribué à Stoned Jesus, emmené par le très sympathique et très souriant Igor Sidorenko. Ce trio fondé en 2009 officie dans la catégorie Stoner Metal contemporain et dispose déjà d’une certaine notoriété dans le milieu underground. Comme il y a deux ans lors de leur mini tournée en France (Up In Smoke avec les français de Mars Red Sky), les ukrainiens n’ont fait qu’une bouchée de leurs concurrents directs. Leurs paroles pour la plupart très émouvantes et/ou liées à l’occulte ont attirés l’attention d’un public bien à l’écoute. A revoir très vite donc en ce qui me concerne.

Une fois la fête terminée, on fait le bilan et on prépare la suivante…Yann Le Baraillec et toute son équipe vous donnent d’ores et déjà rendez-vous du 16 au 18 Août 2019 pour une douzième édition en terre bretonne. Attention, le « sold out » risque bien de devenir monnaie courante avant l’ouverture. Un festival que l’on vous recommande chaudement et que nous vous invitons à découvrir absolument si ce n’est pas déjà fait.

Arno JAffré